En écoutant le début des montagnes hallucinées, livre audio publié chez Libellus, mon atelier 7, que je voyais consacré à un développement plus « raisonnable » a déraillé. Me voila reparti sur une tangente…..
HPL et Blair Witch, même combat ?
Ca y est ? Vous l’avez écouté ? Même pas peur ? Ben oui. C’est normal. Avant de penser a faire peur, la première étape de l’horreur moderne, c’est de plonger le lecteur dans une univers réel, donc , le plus banal possible. La méthode de JR James, spécialiste et fondateur des récits de fantômes modernes, peu connu en France, mais figurant parmi les inspirateurs clefs de Lovecraft.
Dans cet extrait donc, qu’entend-on ? Des faits. Des dates, des quantités, des noms. Pour un peu on croirait un documentaire (a l’ancienne, genre France 3, pas un de ces machins du Discovery Channel) sur la préparation d’une expédition vers l’antarctique. Ou plutôt un faux documentaire. Voila encore un aspect de la modernité de Lovecraft, a l’heure ou le genre du « faux docu » (ou Mockumentary) à la vente en poupe.
Le genre n’est pas nouveau ceci dit, de Peter Watkins (les excellents Wargames, 1965, Punishment park, 1971) et dans l’horreur s’est illustré avec par exemple le récent REC.
Alors oui, il parait difficile d’envisager cette forme dans le cadre d’une partie de jeu de rôles. Et pourtant. Le Mockumentary n’est pas très loin du « found footage », ces « films trouvés », comme dans « Blair Witch ». Or, quand Lovecraft ne donne pas dans le presque « Mockumentary », il fait dans le presque « found footage » : combien de ses récits commencent par la fin, avec les dernières lignes du carnet du narrateur, vous mettant en garde et généralement se préparant à une mort prochaine ? Il suffirait de peu pour qu’il soit déjà mort.
D’autres auteurs parmi les inspirateurs de HPL, comme HR james, Machen et Hodgson, utilisent eux littéralement et souvent cette technique du « carnet trouvé » pour mettre leur récit en abîme. La technique du « narrateur acculé » est cependant plus pratique à manier.
Deux bonnes raisons de les utiliser en jeu, et comment.
L’une est d’utiliser cette technique « du documentaire » pour les même raisons que la littérature ou le cinéma : mettre en confiance, dans un monde « normal » pour mieux capturer l’audience et rendre l’horreur plus offensive. Dans ce cas, le Meneur prendra un soin tout particulier aux descriptions. J’avoue toutefois que je ne vois pas bien comment le système pourrait conduire meneurs et joueurs à insister sur les détails triviaux, quantitatifs, la logistique, etc… au plus les destinations seront exotiques, au plus l’introduction ira dans ce sens, pour rendre réaliste le départ « dans l’ailleurs », à l’inverse de toute aventure extravagante.
L’autre raison est d’utiliser « l’introduction d’un narrateur » pour créer des « arcs narratifs » pour les parties en « campagne » en donnant plus de « pouvoir narratif » à un joueur particulier
Ce pourrait être une action de début de partie, du genre
Tu es seul devant ton carnet de notes. Quelque chose est allé très mal…
A l’heure ou j’écris, je ne devrais déjà plus être en vie. Pendant qu’il en est encore temps, je vais essayer de relater cette histoire, au cas ou quelqu’un trouverait ce carnet. Tout à commencé ___________ à __________Nous étions x, [énumérerez les participants] réunis a sujet de________________ . J’étais très loin alors de me douter que….
Chaque blanc donnerait lieu à une série de choix génériques. Sort of. Evidemment, l’action devrait être écrite correctement, afin de poser les bases de la direction dramatique et de lier chaque personnage aux enjeux. Éventuellement, cela peut comporter des conséquences mécaniques (par exemple un +1 chaque fois que le personnage-écrivain agit dans le sens qu’il a choisi dans l’action de départ ou a la prochaine action suivant qu’il agit dans le sens de l’introduction)
Enfin, tout cela pose la question des « artefacts »trouvés en jeu, notamment les lettres et autres objets à lire, aussi typiques des histoires de HPL que des parties d’adc, et qui devraient trouver une place de premier plan. Comment ? Je n’en ai pas la moindre idée…
Crédit photo: Les très beaux nécronomicons de chez Millecuirs.