Depuis 30 ans, l’appel de Cthulhu a fait les beaux jours du Jeu de Role, aux cotés des Donjons et des Vampires…mais le succes a son revers. Dans un récent article sur Tric-Trac, le Dr Mops écartait rapidement (ou était-ce Mr Phal) le (enieme) theme lovecraftien d’un jeu, qui « passé les 14 ans perdrait de son attrait ». Lovecraft est il condamné, en matiere ludique, a la pokemonisation ? Pas si sur, pour peu de se donner la peine de faire, enfin, un retour à la prose du Maitre de Providence…
Lovecraft et l’âge d’or du JDR
Rappelons le. au milieu des années 80, L’appel de Cthulhu fut certainement LE jeu qui insufla une nouvelle direction au jeu de rôle, l’eloignant definitivement du porte-monstre-trésor, proche de l’esprit des wargames, et qui était alors dominant. Au dela du theme, il doit encore davantage son succes à un cadre assez lache, comme ADD, mais privilégieant la discussion et l’ambiance sur la « simulation ».
Aboutissement logique, c’est aussi a ce moment que l’idée que le “systeme est secondaire” se renforce dans le monde du JDR. Evidemment, si dans les donjons humides on avait besoin de connaitre a chaque tournant l’issue des combats et le nombre de PO et de XP remportés (et notez que c’est toujours le cas chez leurs descendants massivement multijoueurs), a l’Appel de Cthulhu (adc), ces systemes ne permettent pas de créer l’ambiance recherchée, qui repose sur les interactions (le « roleplay » qui prend le devant) et les talents de metteur en scene du « Gardien des Arcanes ».
Ainsi, le systeme de l’appel de Cthluhu, simple et basé sur des %, passe rapidement au second plan….et pourtant, ca fonctionne. La preuve, on (entre autres, votre serviteur) s’en souvient encore.
30 ans apres, un nouveau départ ?
Oui, mais, une géneration de succes et de produits derivés plus tard, Lovecraft semble galvaudé, épuisé. Le JDR n’échappe pas a la regle. Dès le depart, l’Appel de Chtluhu s’accomodait implicitement de larges concessions a l’esprit « Donjon » qui l’eloigne de la fiction du Maitre de providence: les investigateurs vont rapidement optimiser leur équipement, calibres et grimoires inclus (meme si, il est vrai que les joueurs savent pertinemment que tout cela devrait au mieux mal se terminer pour eux). Cette pente n’a fait que s’accentuer avec des jeux certes respectables mais qui n’entretiennent plus qu’un tres lointain rapport avec les écrits de Lovecraft, malgré les apparences, au dela du bestiaire paranoiaque. Sans parler de l’avalanche de jeux de plateaux, cartes et autres, parodiques ou non, qui terminent de reduire Lovecraft a quelques clichés.
Et pourtant, comme je l’ai souligné (quelques lignes plus haut), Lovecraft n’a, des le debut, que tres partiellement été utilisé…
Or, de nouveaux outils ludiques existent pour “émuler” des histoires lovecraftienne plus efficacement (et plus proches de leur sources), non pas en rejetant le systeme au second plan, mais en l’utilisant comme moteur de la fiction. Innomable de Christoph Boeckle constitue une de ces tentatives.
Le système apocalypse a quant à lui plusieurs autres avantages pour cela.
D’un coté, par nature, il sait se faire oublier, comme le systeme originel et encore davantage. Mais plus encore, il est totalement centré sur la fiction (et non pas le calibre des armes, ou le % de chance de toucher une maigre bete de la nuit à 55 km/h par temps de pluie).
Une telle adaptation existe en anglais avec Tremulus, mais présente deux problèmes.
– Le premier réside dans la façon de s’approprier un système (Apocalypse World) et une oeuvre (celle de lovecraft,tombée dans le domaine public en Europe) qui sont ouvertes et devraient donc le rester.
– Le second, plus essentiel, tient à l’approche “pulp” revendiquée qui noie la spécificité de l’oeuvre de Lovecraft et de ses compagnons (ou du moins, en défini mal la quintessence) et qui tire peu de profit du systeme apocalypse pour revivifier le genre.
La proposition
Horreur cosmique & Etranges éons propose donc de créer un jeu (ou plutôt, une serie de jeux) tiré du systeme apocalypse, exploitant l’univers lovecraftien, et plus largement le genre de “l’horreur cosmique”, sur les bases suivantes
– Licence ouverte: tout le monde est libre d’utiliser le contenu creé, de façon commerciale ou privée. Ce principe respecte la nautre des oeuvres, permet l’appropriation par le plus grand nombre de joueurs, et le developpement à long terme de suppléments
– Développer par ateliers: au vu de la demarche ouverte, pour que le jeu soit adapté aux joueurs, il est preferable d’integrer les avis a l’elaboration
– Puiser dans l’experience: confronter les principes theoriques de conception à l’experience empirique en se posant toujours la question: « quels sont mes meilleurs souvenirs de l’adc et pourquoi ? »
– Revenir aux sources : Le « Mythos » n’est pas un catalogue de créatures plus ou moins poulpeuses. C’est un principe général et un code narratif, traversé de thèmes particuliers. Il ne se réduit pas à Lovecraft, et peut prendre des formes sensiblement différentes, d’Abraham Merritt à Robert Bloch, de Clark Ashton Smith à Hodgson, jusqu’ à Charles Stross: en analysant les recits, horreur cosmique et sens du merveilleux sont des termes qui devraient guider la fiction.
– Assumer, réinterpreter et intégrer les implications de l’oeuvre de lovecraft :au dela de la surface de la narration, l’oeuvre de Lovecraft est baigné par la personnalité de Lovecraft: crainte d’une certaine forme de modernité, refuge dans l’imaginaire, xénophobie ou racisme latent…., sans tomber dans le manichééisme, il s’agira d’integrer cette dimension personnelle.
Les Sources
Pour tout cela, en attendant le premier atelier, voici quelques réferences….
– Les ouvrages de lovecraft (ici, ayant trait au mythe, hors contrées du rêve)
– Certaines nouvelles du cercle de lovecraft (la cité de la flamme chantante de CAS): certaines nouvelles versant dans un tonalité differente mettent en lumiere le « sens of Wonder » et « l’eerie » essentiel au genre
– Les écrits de lovecraft sur la fiction: on y trouve le point de vue de l’auteur lui même
– Stealing Cthulhu de Graham Walmsley. il y décortique la fiction pour son utilisation en JDR
– Les cahiers de l’herne « lovecraft » , 1969: une réference
– le cas HPL ( https://www.youtube.com/watch?v=ZPeM1UUMGaE) :un biopic/these sur Lovecraft
– Une vie, une oeuvre France Culture https://www.youtube.com/watch?v=E8lD9-RaFuU&list=RDE8lD9-RaFuU#t=4
– Contre l’homme, conte le monde, Houllebecq :www.dailymotion.com/video/x6rtzh_houellebecq-lovecraft-contre-le-mon_creation et http://fr.wikipedia.org/wiki/H._P._Lovecraft._Contre_le_monde,_contre_la_vie
– Apocalypse World et ses dérivés